Sale Histoire (2)
Aurélie, donc.
Après un samedi bien rempli à l’Assoce, elle invite les copines chez elle, pour un apéro - Noelle et Janie, l’animatrice. Les petites seront couchées, on sera tranquilles entre filles, je vous ramènerai. Banco.
S’installent dans le séjour, au rez-de-chaussée. Pas de trace de Colin. Ca trinque, ça grignote, ça boit, ça papote.
Le temps passe. Noelle, que la vessie travaille : où sont les toilettes ? Faut monter, c’est à l’étage. Elle y va.
Déboule de la salle de bains, le Colin, nu la serviette à la taille, comme s’il guettait. Il l’attrape, la serre immédiatement, poisseux. Sa phrase d’accroche, immonde, ordurière, absurde jusqu’à un triste cocasse : tu rêvais que ça que je t’encule, hein, grosse cochonne ? Choc. Imagine : Noelle, une gamine attouchée dans son enfance, dix-huit ans maintenant, traumatisée en rémission. Tétanisée, mais se débat, proteste. Le chantage mielleux du pervers : tais-toi, laisse-toi faire ou tu vas réveiller les petites. Rien à foutre des petites. Elle se dégage, descend. Arrivée en bas, n’ose trop rien dire, s’assoit.
Peu après, au tour de Janie de monter. Noelle prostrée n’ose rien dire - il doit s’être rhabillé depuis. Que dalle. Nu et tout; rebelote. Janie, Janie, ah, tu me plais. Ô laid spectacle. La Janie, qui a quoi, vingt-six ans ? Longiligne et réservée, mais de la ressource face à l’imprévu : la poigne ferme et le coffre pour mater n’importe qui. T’approche pas ou je te pète la gueule. Vite esquivé.
Redescend. Bon, ben merci Aurélie, mais nous on va y aller maintenant.
Pas eu de plainte déposée. Mais maintenant ? Car maintenant, elles savent, Aurélie sait, nous savons.
L’horreur de la situation est un abîme se creusant à mesure que mon regard s’y enfonce. Que fait-on quand on a construit toute sa vie avec un monstre ?